J'ai eu une enfance de juif religieux, de juif orthodoxe, qui allait à la synagogue quasiment tous les matins, qui priait trois fois par jour, qui avait une kippa sur la tête, deux hors de dents partout, qui étudiait le Talmud, la Bible continuellement.
Et surtout, je voulais être rabbin.
Je voulais vraiment l'être, je me préparais à l'être.
Je donnais même des cours de religion, de commentaires bibliques dans ma synagogue.
Et j'étais très heureux dans cette perspective.
Et en fait, à la fin de mon lycée, juste avant de commencer Enfin, mes études rabbiniques, j'ai, entre guillemets, je le dis en une phrase, mais j'ai perdu la foi, tout s'est écroulé, précisément par la découverte de la philosophie.
Et donc j'ai vraiment rompu totalement avec la religion, pas avec le judaïsme, mais avec la religion, et totalement, ça veut dire que j'ai tourné le dos à ma pratique, j'ai perdu mes amis, j'ai fait une sorte de nouvelle vie, de nouvelle naissance, et je me suis lancé dans les études philosophiques, dans la littérature, dans l'écriture, Et donc, précisément, c'est ce que j'ai appelé penser contre moi-même au sens extrêmement littéral et au sens extrêmement incarné.
– Si je vous écoute, finalement, penser contre soi-même, c'est une éthique de vie ?
– Oui, c'est une éthique de vie, exactement.
Et cette éthique de vie, c'est aussi que penser contre soi-même, ça suppose, je pense très minimalement, de ne pas être dogmatique.